TRANSFORMER le paysage

Souhaitant sortir du musée, perçu comme un espace trop refermé sur lui-même, des artistes des années 1970 vont investir d’autres lieux, notamment les grands espaces désertiques américains comme le haut plateau du Nouveau-Mexique où Walter de Maria implante 400 paratonnerres. Ces earthworks caractéristiques du mouvement du Land art américain impliquent une certaine idée de la nature liée à une approche romantique du sentiment de sublime face à la vastitude de ces contrées. Robert Smithson et d’autres ne se contenteront pas toujours d’investir le lieu par le positionnement d’un artefact, ils modifieront parfois radicalement sa configuration spatiale. Ainsi, la Spiral Jetty, 1970, remodèle les rives de Great Salt Lake, Utah, pour créer une jetée de forme spiralaire. Certes, d’autres artistes comme l’artiste anglais Andy Goldsworthy se soucient davantage d’une échelle plus modeste et d’une inscription dans le paysage qui marque sans bouleverser. Dans tous ces cas l’auteur intervient « in situ », terme que l’artiste Daniel Buren emprunte à l’archéologie pour désigner, dans les arts plastiques, le travail qui s’inscrit dans le site même.

Par ailleurs, c’est au jardin que certains s’intéresseront, celui-ci étant différent du paysage par l’aspect clos de son espace. Dans cet esprit, Ian Hamilton Finlay fait de son jardin « Little Sparta » une rencontre entre le monde des idées et le lieu en implantant des pierres gravées d’épitaphes parmi les plantations végétales.

Ajoutons qu’au XXIème s. les préoccupations liées à la sauvegarde de la planète semblent reprendre le geste pionnier de Joseph Beuys. En 1982, il commence à planter les premiers arbres des 7000 chênes qui viendront changer le rapport au végétal dans les espaces de la ville de Kassel. En ce sens, les interventions dans le paysage sont comme des réparations ou du soin apportés à l’environnement. L’œuvre travaille avec les matériaux du lieu, ne le dénature pas et instaure une éthique en plus d’une esthétique (voir par exemple les œuvres de Gilles Bruni ou de François Méchain).